Entretiens

« L’événementiel n’est plus un métier d’hospitality et de restauration, mais un métier marketing »

Pierre Metrailler, CEO de SpotMe, nous partage sa vision de la transformation du marché à quelques jours du digital event du 20 mai "Pourquoi l'hybride va devenir la nouvelle norme événementielle". 

Publié le 11/05/2021 à 14:43, mis à jour le 12/05/2021 à 10:19.

Pierre Metrailler
© DR

Nombreuses sont les solutions pour digitaliser ses events qui ont émergé avec la crise Covid. Cependant SpotMe est un des leaders du marché avec une expérience de plus de 20 ans. Quelle est votre valeur ajoutée ?

Si notre entreprise s’appelle SpotMe, « trouve-moi » en français, c’est pour une bonne raison. En effet, accélérer le relationnel au travers d’expériences numériques est notre credo. Nous pensons qu’une bonne relation, en interne comme en externe, fonctionne bien si elle a une fréquence soutenue, si elle est multidirectionnelle, proche de l’humain, pertinente et dans son contexte. Notre valeur ajoutée repose donc sur notre capacité à traduire les attributs de cette bonne relation dans la technologie et une offre de services déclinables, que ce soit en présentiel, en distanciel ou encore en hybride.

Il faut penser ses événements d’un point de vue stratégique, diversifier les formats, tout en s’appuyant sur une plateforme qui permet de monitorer et d’assurer un suivi. En termes d’engagement, cela veut dire donner la possibilité aux participants de dialoguer de manière horizontale, ou bien de « traverser » l’écran pour devenir intervenant à l’occasion d’une sous-commission par exemple. Nous mettons dans la main des organisateurs différentes options afin qu’ils puissent changer la dynamique de leurs événements et ainsi proposer différentes expériences. Enfin, il faut évoquer la pertinence de la relation. Les contenus se multipliant, il est important de les personnaliser et de guider ces derniers en direction des bons interlocuteurs.

Comment avez-vous vu évoluer les attentes de vos clients depuis un an ?

Les organisateurs ont dû faire face à une situation d’urgence mais à partir du mois d’octobre 2020, on a vu des réflexions stratégiques se mettre en place au sein des entreprises, notamment des grands groupes. Les clients viennent nous voir et nous demandent des solutions numériques pour gérer leurs événements dans les prochaines années. Ils passent des appels d’offres car ils ont pensé leur stratégie et pris la décision d’investir. Autre aspect intéressant, la découverte de nouveaux formats. Vis-à-vis de ces derniers, nous sommes passés de la tolérance, puis à l’acceptation, pour finalement être convaincus de leur pertinence.

Inimaginables il y a encore deux ans, l’événement plus court, le multi-événement, l’événement morcelé, etc., sont désormais prisés. C’est un peu la fin de l’événement traditionnel sur 2,5 jours

Inimaginables il y a encore deux ans, l’événement plus court, le multi-événement, l’événement morcelé, etc., sont désormais prisés. C’est un peu la fin de l’événement traditionnel sur 2,5 jours. Il y a donc une nouvelle ouverture d’esprit qui voit le jour, que ce soit au niveau du top management comme des chargés d’événements. C’est une excellente nouvelle qui ouvre la voie à une explosion de la créativité ! Cela laisse la place à l’innovation pour imaginer de nouveaux formats relationnels.

Et les profils clients, ont-ils évolué ?

Nous observons également l’arrivée de décideurs issus du marketing dans la chaîne de décision événementielle car nos solutions s’intègrent dans des stratégies multicanales. C’est comme si l’événementiel avait retrouvé sa juste place parmi les outils de communication efficients. Car n’oublions pas que grâce au digital, on peut parler business, leads, KPI, etc., et ce pour des actions de communication en externe comme en interne. Aujourd’hui, 60% des marketeurs nous consultent en premier, puis amènent dans la boucle décisionnelle leurs collègues de l’événementiel. Quant aux grands événements hybrides, nous travaillons avec des agences qui prennent le relais, tout en utilisant notre plateforme. Nous avons d’ailleurs développé l’Académie SpotMe qui nous a permis de certifier une cinquantaine d’agences, dont 25 en France, sur l’utilisation de notre plateforme.

En quoi le format hybride va-t-il être la nouvelle norme dans les mois, voire années à venir ?

Désormais le format va être dicté pour la personne qui fait le choix de venir, ou pas, sur un événement. L’organisateur n’a pas vraiment d’emprise sur ce phénomène. Il fait une proposition mais in fine ce sont les participants qui vont dire ce qu’ils souhaitent faire. C’est donc aujourd’hui un pari pour l’organisateur de miser sur du présentiel, du distanciel ou du full digital. Nous faisons l’hypothèse chez SpotMe qu’au-delà de la crise sanitaire, il y a un vrai changement dans les habitudes et les préférences du consommateur d’événements. Et ce pour deux raisons. Premièrement, il y a une habitude qui a été prise de rester tranquillement derrière son ordinateur. Dès que cela sera de nouveau possible, beaucoup de monde va vouloir revenir à du présentiel puis les choses vont se rééquilibrer. Nous faisons donc l’hypothèse que les déplacements vont se réduire, surtout si ces derniers sont synonymes d’aérien, de plusieurs jours d’absence, etc. Deuxièmement, il y a les discussions autour de la RSE et de l’impact environnemental, ou encore de l’éthique, qui plaident en faveur du distanciel. Désormais, beaucoup de chercheurs, de médecins par exemple disent ne plus vouloir participer à des congrès nécessitant un voyage en avion. C’est clairement une tendance.

Selon vous, est-on à un tournant important en matière d’organisation d’événements ?

Assurément. Les organisateurs vont devoir se demander combien de participants loupent-ils s’ils ne font que du présentiel. Nous pensons que le pourcentage sera entre 20 et 40%. Il faut donc coller aux préférences d’usage des participants, à leurs nouvelles habitudes de consommation des events. Et puis les budgets ne vont pas augmenter. Ils ont été en baisse en 2020, notamment parce que l’engagement des publics a pu se poursuivre avec succès grâce aux solutions digitales. Il va y avoir des arbitrages qui vont se faire au détriment du présentiel. Certains de nos clients nous disent vouloir faire davantage d’events virtuels et garder deux gros événements en présentiel. Donc faire davantage avec le même budget finalement.

L’âge d’or du freelance qui organise un event, réserve un lieu puis un traiteur est sans doute terminé. Cela existera toujours pour des petites réunions mais c’est tout

L’âge d’or du freelance qui organise un event, réserve un lieu puis un traiteur est sans doute terminé. Cela existera toujours pour des petites réunions mais c’est tout. Il est crucial de comprendre que les attentes en termes de data, de retour sur l’émotion, de taux d’engagement, de contenus disponibles on demand sont devenues des prérequis. Et c’est vrai pour la com’ interne comme externe. L’événementiel n’est plus un métier d’hospitality et de restauration, mais un métier marketing. Nous avons même des clients qui mettent des objectifs chiffrés dans nos contrats en termes d’activation et de conversion par exemple. Cela fait partie du job de la techno que de délivrer et d’être très concret sur ces points-là.

Quelles sont vos priorités dans les prochaines semaines et que va proposer SpotMe en termes de nouvelles fonctionnalités ?

Tout le monde parle d’hybride actuellement mais le sujet est de savoir à quoi cela ressemble. Dans les événements hybrides, la composante fondamentale est l’expérience digitale. Et si durant la pandémie nous avons tous été derrière nos ordinateurs, le sujet désormais est d’avoir une stratégie mobile first. Nous avons lancé la première appli événementielle spécifiquement pensée pour l’hybride. Ce qui nécessite de n’avoir aucun a priori sur le lieu où se trouve le participant, celui-ci pouvant effectivement être présent dans la salle ou bien dans le métro ou encore sur un autre événement. Cette application est en train d’être déployée sur la France et sera lancée le 15 mai. Autre nouveauté qui arrivera à la fin juin avec le contenu à la demande. Nous repensons notre offre on demand au regard de la « netflixication » de l’événementiel. Aujourd’hui, plus de 80% de la consommation des contenus se fait à la demande. C’est énorme, même si cela ne veut pas dire que les publics ont arrêté de regarder du live. Enfin, toujours fin juin, nous lancerons une offre pour combler le vide existant entre le webinar basique et un événement très complexe. Il y a un véritable besoin pour une solution plus expérientielle que le webinar et moins couteuse en termes de production.

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