Entretiens

« Nous sommes dans un combat de longue haleine où tous les 15 jours la situation peut changer. »

La reprise de l’activité événementielle tarde à se profiler en raison de la menace épidémique persistante. Après des semaines à œuvrer pour la sauvegarde des professionnels, Pablo Nakhlé Cerruti, directeur général de Viparis*, revient pour nous sur ces dernières semaines et les perspectives du marché des salons et rencontres professionnelles.

Publié le 25/08/2020 à 15:40, mis à jour le 04/11/2020 à 19:10.

PABLO NAKHLE CERRUTI PORTRAIT
© DR

Comment Viparis a encaissé cette crise inédite qui a mis toute l’industrie des events à l’arrêt ?

Comme tous, avec autant de soudaineté que de violence. Toutefois, avec un comité de direction soudé, des équipes entrainées et la confiance de nos actionnaires nous avons engagé les mesures immédiates, c’est-à-dire la mise en sécurité économique et sanitaire de nos collaborateurs : activité partielle, télétravail, réorganisation des bureaux, fermeture des sites.

Une fois les process de crise mis en œuvre, et tout en faisant, dé-faisant, re-faisant nos scénarios, nous avons taché d’anticiper les conditions progressives et optimales de la reprise pour l’ensemble de nos collaborateurs, clients, prestataires et visiteurs. Cela passe par la création du label sanitaire SAFE-V, pour tous nos sites et certifié par Bureau Veritas, incluant des protocoles stricts s’agissant du nettoyage, du filtrage, du respect des gestes barrières, etc.

Il faut marquer la différenciation de Paris, dans un format et un contenu spécifiques pour la Capitale.

Enfin, nous nous sommes tournés vers l’ensemble de nos parties prenantes. Les autorités publiques d’abord, avec plus ou moins de succès, mais surtout nous sommes dans un combat de longue haleine où tous les 15 jours la situation peut changer. Avec les acteurs de la destination Paris aussi, pour “penser l’après” : maintenir le lien avec notre communauté de clients ou de prospects et marquer la différenciation de Paris, dans un format et un contenu spécifiques pour la Capitale.

31 octobre versus 1er septembre : le report de l’autorisation des événements de + 5 000 personnes est un nouveau coup dur pour le secteur. Quelles sont les incidences pour Viparis ?

Nous sommes en discussion directe tant avec la Cellule Interministérielle de Crise qu’avec la Préfecture de Police. La volonté de tous est claire de distinguer les rassemblements professionnels et notre capacité collective à les gérer dans les meilleures conditions sanitaires. Nous plaidons pour que cette règle des 5 000 soit appréciée de deux façons cumulatives : à l’instant T et par bâtiment. C’est à cette condition que notre activité pourra reprendre sereinement.

Le gouvernement a été rapidement à l’écoute de la filière dont vous êtes l’un des porte-paroles. Est-ce que les mesures d’accompagnement sont allées dans le bon sens ?

Unimev a réalisé en 6 mois un travail de lobbying fantastique et notre activité est désormais identifiée non seulement pour le tourisme mais aussi pour son rôle économique et les retombées générées partout en France.

Le régime exceptionnel d’activité partielle ainsi que les exonérations de charges vont dans le bon sens. Je regrette toutefois que, compte tenu du choc spécifique à notre activité, des mesures sectorielles n’aient pas été prises. A commencer par soutenir toutes les entreprises de la filière, ETI comprises. Il ne s’agit pas seulement de Viparis, il s’agit de permettre aux quinze plus grandes entreprises du secteur de passer aussi au travers de cette période et de jouer leur rôle de locomotives économiques lors du redémarrage.

Il semble malgré tout que ces mesures ne suffiront pas à sauver l’année 2020. Quelles sont vos perspectives business ?

2020 est une année terrible. Nous savons que le premier semestre de l’année 2021 sera également très dégradé. Pour retrouver le chemin de la croissance, charge à nous de démontrer que les rencontres professionnelles restent possibles et même nécessaires, mais aussi que Paris demeure une destination de choix pour les organiser.

Comment avez-vous accompagné vos clients organisateurs d’événements durant la crise et comment gérez-vous l’épineuse question des reports ?

Les organisateurs comme les prestataires sont concernés. Les équipes commerciales et chargées des opérations de Viparis ont passé un temps infini, et nécessaire, sur les plannings d’activité pour trouver des places de reports là où cela était possible au second semestre, voire au premier semestre 2021. Chaque discussion se fait au cas par cas. Je sais que nos clients l’ont apprécié et reconnu.

Protocole sanitaire stricte, format hybride : les congrès et salons maintenus sur septembre vont donc donner le ton des mois à venir ?

Ils seront nécessairement scrutés. Côté Viparis, nous avons commencé à nous rôder dès juillet sur nos protocoles sanitaires lors des examens que nous avons accueillis comme pour des ventes privées. Nous serons au rendez-vous de la rentrée.

Comment voyez-vous évoluer l’activité des rencontres professionnelles et événementielles à moyen terme ?

Certains événements ont déjà annoncé leur transformation en rencontres « hybrides » mêlant physique et digitale, l’un nourrissant l’autre. Le digital complète l’expérience physique de l’événement, c’est une évolution naturelle.

Le rôle de Viparis sera d’apporter une plateforme technique irréprochable à ces événements hybrides, qu’il s’agisse de l’arrivée de la 5G, de WIFI HD, de Bluetooth voire de Lora pour l’internet des objets.

Au-delà, les formats d’événements changeront aussi et je crois que cette crise ne marquera pas nécessairement une rupture mais plutôt une accélération de l’hybridation -aussi !- des formats. En ce sens, la stratégie de Viparis pour que nos lieux soient plus flexibles et plus ouverts est la bonne.

*Gestionnaire des sites de la Paris Expo Porte de Versailles, Paris-Nord Villepinte, Paris-Le Bourget, Palais des Congrès de Paris, Espace Champerret, Espace Grande Arche, les Salles du Carrousel, Palais des Congrès d’Issy-les-Moulineaux et Hôtel Salomon de Rothschild. 

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