Entretiens

"Il est important de travailler sur l’héritage des JO, à la fois pour nos métiers et pour la destination"

Béatrice Cuif-Mathieu et Philippe Pasquet* sont les deux nouveaux co-présidents d’Unimev. Pour MyEN, ils présentent leur feuille de route pour les quatre années à venir. 

Publié le 29/11/2023 à 14:59, mis à jour le 01/12/2023 à 09:50.

Cuif-Mathieu et Pasquet
© DR

Vous venez de prendre la présidence conjointe de Union française des métiers de l’événement (Unimev). Comment se porte l’association, et plus largement le secteur ?

Philippe Pasquet : Unimev se porte très bien, avec un nombre croissant d’adhérents. Nous avons renforcé notre visibilité durant la crise Covid, période difficile pour nos métiers, mais qui a eu le mérite de valider la pertinence et l’importance des rencontres professionnelles. Par ailleurs, nous ressentons une forte mobilisation des acteurs de la filière pour participer aux réflexions et donner une nouvelle dynamique au collectif. 

Béatrice Cuif-Mathieu : J’ajouterais que nos prédécesseurs ont enclenché un rapprochement entre les différents membres de notre famille, à l’instar du Leads et de Prestalians, ou encore de 7 associations régionales. Durant la crise sanitaire, est ressortie la nécessité d’avoir un lien permanent et de confiance entre les élus, les acteurs professionnels et les territoires. Chacun sait aujourd’hui l’importance des événements pour nourrir l’attractivité des territoires et l’économie française. 

Nous venons de procéder à la désignation de 12 référents régionaux Unimev dont l’objectif est d’étendre l'influence de l'association dans les territoires

La filière a donc réussi à être globalement lisible et visible, et nous poursuivons nos travaux en ce sens au travers du club Ev'&Terr par exemple. Par ailleurs, nous venons de procéder à la désignation de 12 référents régionaux Unimev dont l’objectif est d’étendre l'influence de l'association dans les territoires, de maintenir un lien direct entre les professionnels et les événements qui sont déclencheurs d’une mise en avant des filières économiques locales, et enfin de permettre de démontrer l'intérêt, pour l’ensemble des métiers, d’adhérer à notre association. 

Quelle est votre feuille de route pour les 4 ans à venir ?

P.P. : Nous avons proposé à notre Conseil d’administration différentes thématiques que nous souhaitons traiter en priorité. Parmi les 10 points que nous avons dégagés, le premier est de pérenniser une organisation collective forte, en cohérence avec les évolutions des métiers de l’événementiel. Il s’avère en effet que ces métiers évoluent, des acteurs de l’entertainment, de l’audiovisuel ou encore du sport faisant quelque peu bouger les lignes. D’autre part, lors de la crise Covid, les pouvoirs publics ont bien signifié qu’ils voulaient écouter des référents puissants, et non une multitude d’acteurs. Charge à Unimev de continuer ce travail, dans une période que nous espérons un peu plus stable économiquement. 

B.C.M : Nous avons aussi deux axes qui nous tiennent à cœur, à savoir l’emploi, l’attractivité et la détection des talents, et par ailleurs la performance de nos événements. J’entends par là également la sobriété et la durabilité qui participent de cette performance, comme de notre attractivité vis-à-vis de nos futurs collaborateurs. Il y a donc toute une stratégie d’Unimev bâtie avec par exemple un travail auprès d'écoles partenaires et sur la formation, dossier initié avec la ministre Carole Grandjean, ou encore sur le renforcement de notre visibilité sur un certain nombre d’événements. 

Nous allons mettre en place un réseau national et international de femmes de l’événementiel, avec la mise en place d’actions de compagnonnage et de mentorat dans les entreprises

Enfin, nous allons mettre en place un réseau national et international de femmes de l’événementiel, avec la mise en place d’actions de compagnonnage et de mentorat dans les entreprises. Notre filière ne manque pas de femmes inspirantes et nous pourrions ainsi briser des plafonds de verre ou encore susciter des vocations. 

Quant à la performance des événements, notre ambition s’illustre notamment à travers l’Engagement pour la Croissance Verte que nous avons signé l’an dernier, ou encore avec Cleo Performance et Cleo Carbone, mais il nous faut aller plus loin en amenant toute la chaîne de valeur de notre filière. 

Nous sommes par ailleurs persuadés qu’il faut miser sur l’innovation, sur la transition numérique mais aussi sur l’intelligence artificielle pour progresser individuellement et collectivement. 

Le sujet du rapprochement d’Unimev de l’association L'Événement est-il toujours d’actualité ?

P.P. : Oui, et des discussions sont toujours en cours. L'Événement et ses entreprises adhérentes font évidemment partie du spectre des métiers qui ont vocation à être représentés par Unimev. Aujourd’hui, il y a un changement de gouvernance chez les deux instances, donc laissons passer un peu de temps pour que chacun s’installe, mais ce rapprochement est d’une cohérence totale. 

B.C.M : Vous aurez remarqué que la présidente de L'Événement Muriel Blayac était signataire de notre dernier livret « Grands enjeux économiques et sociaux : la contribution des événements professionnels”. Donc oui, nous continuons de travailler ensemble dans un esprit collectif. 

Pour revenir sur la performance, qu’en est-il de celle des infrastructures d’accueil d’événements dont certaines sont vieillissantes et ne répondent pas aux normes environnementales actuelles ? 

B.C.M : Cette question figure également à l’ordre du jour de notre feuille de route. La plupart des infrastructures d’accueil sont la propriété de collectivités qui les ont placées, sous un forme juridique ou une autre, en délégation à des opérateurs comme ceux représentés par Philippe ou par moi-même. Unimev a engagé un travail pour que le Fonds Vert du gouvernement, qui prévoit des investissements pour assurer la transition énergétique des bâtiments au sens large, puisse en partie être fléché ou utilisé pour nos infrastructures.

Nous avions estimé à 2 milliards d’euros le montant des travaux nécessaires à l’amélioration de la gestion énergétique et la rénovation thermique des infrastructures.

Nous avions estimé à 2 milliards d’euros le montant des travaux nécessaires à l’amélioration de la gestion énergétique et la rénovation thermique des infrastructures. Par ailleurs, les délégataires investissent eux-mêmes dans leurs outils afin que les bâtiments soient moins énergivores, étant bien souvent engagés dans une démarche RSE vertueuse. Mais il est vrai qu’il faut poursuivre ce travail conjoint entre les propriétaires de sites et les exploitants afin d’aller aussi vite qu’on le souhaite dans ces aménagements. 

2024, année olympique. Le secteur est-il prêt à relever le défi et comment travaille-t-il avec le COJO ?

P.P. : Si Unimev n’est pas directement impliquée dans l’organisation de l’événement-monde, nombre d’entreprises membres le sont ou vont l’être, bien évidemment, et certaines à très haut niveau. Le COJO a souhaité ne pas travailler uniquement avec les leaders du secteur mais aussi des entreprises de taille réduite. Par ailleurs, outre les prestations commanditées par l’instance olympique, il y aura beaucoup d'événements annexes qui vont mobiliser les opérateurs de la filière. 

Évidemment, il y a un peu de stress en amont des JO mais, comme pour les grands sportifs, ce stress participe d’une saine émulation.

Il y a toujours un peu de tensions en termes de recrutement sur un certain nombre de postes, mais nous avons fait un bon tour de chauffe avec l’organisation de la Coupe du monde de rugby qui a fait la démonstration à la fois de l’envie d’événements rassembleurs, mais aussi de la capacité de la France d’organiser, dans de bonnes conditions, des rendez-vous mondiaux de cette importance. Évidemment, il y a un peu de stress en amont du rendez-vous des JO mais, comme pour les grands sportifs, ce stress participe d’une saine émulation. Et rappelons que notre secteur est habitué à travailler en last minute.

Il me semble important de travailler sur l’héritage de ces Jeux, à la fois pour nos métiers et pour la destination. Les savoir-faire développés, les recrutements qui auront été faits ou encore l’image de la France à l’international doivent nous aider à nous améliorer. C’est un sujet à accompagner au niveau collectif, qui fait aussi partie de nos priorités. 

* Béatrice Cuif-Mathieu est par ailleurs directrice générale de Destination Nancy et Philippe Pasquet, directeur général de GL events Exhibitions. 

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