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« La data se retrouve créativement dans l’intelligence artificielle »

A l’occasion du lancement du Grand Prix DataCréa, dont la cérémonie aura lieu le 19 novembre à Paris, Romain Pergeaux, Directeur de la création et responsable de la catégorie Digitale pour le Club des Directeurs Artistiques, et Jean Allary Directeur du planning stratégique, tous deux associés chez Artefact, évoquent l’importance de la data dans la créativité aujourd’hui, son apport, ses défauts et ses évolutions probables. Alors, data et créativité : amies, ou ennemies ? 

Publié le 23/06/2020 à 14:45, mis à jour le 04/11/2020 à 19:10.

Romain Pergeaux et Jean Allary
© DR

Amie, parce que la contrainte permet de créer
Romain Pergeaux : « La data, c’est notamment le micro-ciblage et la personnalisation du message. Or, ces données peuvent être autant de contraintes pour les créatifs. Mais une contrainte n’est pas forcément une mauvaise chose. La contrainte peut aider à être plus créatif. Aujourd’hui, les briefs sont plus précis, plus pointus sur qui cibler, comment ou quoi sur le digital. » 
Jean Allary : « Les contraintes sont des opportunités créatives. La data, c’est aussi la possibilité de focaliser sur certains insights, d’offrir une nouvelle grammaire créative, en faisant de la précision ou du ciblage ultra-personnalisé. »

Amie, parce qu’elle offre des insights inédits
R.P : « La data permet de disposer d’insights que nous n’aurions pas eu sans elle. Or, une grande partie de la créativité réside dans les insights et il est possible d’utiliser la data comme une véritable matière créative. C’est ce que nous avons fait par exemple pour la campagne Greenpeace qui voulait sensibiliser sur les impacts du changement climatique. Nous avons créé une fausse startup immobilière, Orizon, qui permettait aux gens de capitaliser sur la montée des eaux et de voir les annonces des maisons qui seraient en bord de mer en 2100. Dans ce type de cas, la data devient matière à créer de l’expérience. » 

Ennemie, si elle cible trop et oublie l’importance (philosophique) de la culture de masse
R.P :  « Si elle contraint trop en termes de ciblage ou de message, elle peut effectivement freiner les créatifs. » 
J.A : « Trop de personnalisation peut poser problème pour des raisons philosophiques. Le mass marketing avait la vertu de fédérer les gens autour d’une idée puissante et collective. Le super ciblage fait l’inverse. Le but du jeu n’est pas que les gens ne soient plus capables de se parler entre eux parce qu’ils n’ont plus rien en commun. Il faut continuer, grâce à la supergranularité de la data, de chercher des points communs plutôt que du singulier. »

Amie car elle revisite la relation avec les annonceurs
J.A : « La précision des plans marketing permet à de plus petits annonceurs de faire de la publicité. Facebook a réussi à faire grossir le marché des annonceurs de 30%. Cela a fait apparaitre de nouveaux annonceurs et de nouvelles manières de travailler. »

Amie, car elle a fait évoluer les modes de travail
J.A : « Les données ont indirectement impacté les modes de travail car nous ne nous contentons plus de livrer un insight et de laisser les équipes créatives travailler. Nous en discutons, nous avons plus d’échanges avec la création pour savoir ce qui les inspire, sur la façon dont les messages vont être distribués et reçus. Les équipes de la création, du planning stratégique, du média travaillent ensemble et c’est intéressant car il y a plus d’interactions entre les métiers. » 

Amie, quand elle sert à l’intelligence artificielle (et qu’elle est bien utilisée)
R.P : « Aujourd’hui, l’utilisation de la data est en train d’évoluer et ce type de création est moins tendance. Je dirais que désormais, la data se retrouve créativement dans l’intelligence artificielle. Citons par exemple le projet collaboratif numérique lancé par l’agence Fred et Farid « Le soldat inconnu » : une intelligence artificielle est partie d’une base de données de plus de 100 000 photos pour déterminer le visage du soldat inconnu. L’IA ne peut fonctionner que grâce à la data puisqu’elle intègre des masses de données pour apprendre. Par le biais de l’IA, c’est tout un monde de services digitaux qui s’ouvrent à nous. Aujourd’hui, sur le plan créatif, c’est ça la culture de la data. Et on n’en est qu’au tout début de l’IA ! Cela va ouvrir de nouvelles perspectives créatives. » 
J.A : « Auparavant, on regardait une affiche, le message vous parlait ou pas, on le mémorisait ou pas, et ça s’arrêtait là. Aujourd’hui, les idées vous parlent, vous répondent, et peuvent même vous proposer de prendre un café. Il est nécessaire de faire évoluer la grammaire créative, car peut-être que demain nous aurons des demandes spécifiques de clients qui ne voudront pas ce type de dialogue, d’interaction. » 

Quels sont les exemples de campagnes data driven qui vous ont marquées ?
Il y en a énormément. Par exemple :

  • Doconomy (brillant)

  • The time we have left :

  • The Tampon Book (des insights que nous n'aurions jamais eu auparavant) :

  • See Sound :

  • The traffic jam whopper :

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