Entretiens

« Nous devons chercher à toucher les gens qui comptent, au lieu de compter les gens qu'on touche. » 

Président et CEO de Blue 449, Vice-président de l'Udecam, Pascal Crifo évoque le programme des Rencontres du 5 septembre prochain, et revient sur les opportunités offertes par le digital et sur la nécessité de défendre et de reconnaître l'expertise des agences. Rencontre. 

Publié le 19/08/2019 à 15:42, mis à jour le 04/11/2020 à 19:10.

Photo Pascal Crifo
© DR

Vous avez été élu Vice président de l'Udecam. Comment envisagez-vous votre rôle ?
Cela fait vingt ans que je suis dans ce métier, il est temps que je lui rende ce qu'il m'a apporté. Je suis dans cet esprit. Je suis au service de la grande confrérie des agences médias. Mon rôle est de défendre cette catégorie qui peut être parfois attaquée pour de mauvaises raisons, qui doit arriver à prouver la valeur de ses talents, de ses agences dans un contexte où nous sommes particulièrement « challengés », et où nous ne sommes pas toujours en position de force pour pouvoir valoriser notre travail. De nombreux sujets doivent être débattus collectivement, et il est important de défendre nos intérêts.

Vos paroles semblent faire écho aux propos tenus par Mercedes Erra lors du Pouvoir économique des marques, au Ministère de l'économie et des finances le 2 juillet dernier…
Elle a en effet dit quelque chose de très important. De plus en plus, on demande aux agences de travailler dans des délais très courts, à des tarifs de plus en plus bas. Tout ceci conduit à paupériser ce métier et à faire disparaître des vocations et des talents. Or, ce sont les idées qui font bouger les marques et qui sont créatrices de valeurs. De même, la façon d'orchestrer, d'amplifier les médias, a aussi une grande valeur pour l'annonceur.
A vouloir faire des économies ou obtenir plus de travail dans de mauvaises conditions, on met en danger nos métiers. 
Aujourd'hui, le monde des médias a évolué, mais aucun média n'a disparu dans la chaîne de valeur. Tout se rajoute, ce qui créé énormément de complexité. Or, plus c'est complexe, plus il est nécessaire de faire appel à un arbitre impartial. C'est ça la valeur de l'expertise média : embrasser l'ensemble du dispositif pour conseiller les marques. Ce ne sont pas les algorithmes qui peuvent le faire. Or, cette expertise demande du travail, du temps, et a besoin d'être considérée.

Les Rencontres de l'Udecam : pourquoi le choix du thème New Deal Media ?
Nous voulions mettre en avant deux choses : la diversité des médias tout d'abord, et leur transformation. Il y a de nombreuses opportunités, macro ou micro, à comprendre la diversité des médias et la manière dont ils se sont transformés, dans leurs façons de travailler les audiences, d'accueillir la publicité, dans la relation avec les agences et les annonceurs.  La transformation, dans l'univers média, s'est opérée de manière très forte. Le média presse par exemple, a opéré une mue extrêmement spectaculaire sur le digital : la valeur des marques éditoriales leur a donné une seconde vie encore plus puissante. Je pense au Monde, au Figaro, aux Echos, mais aussi au Guardian par exemple, qui sera présent aux Rencontres. 
Ce « new deal media » participe à la richesse d'un plan de communication, et à la richesse de la société au sens large. 

Y a-t-il des nouveautés cette année dans les Rencontres de l'Udecam ?
Ce qui est intéressant, c'est le mélange. Nous avons de nombreux intervenants de haut niveau et, dans la préparation, nous nous attachons à ce que les invités soient vraiment au service du sujet et ne s'inscrivent pas dans une dimension commerciale.
Nous avons reconduit des formats qui ont fait la preuve, les années précédentes, de leur efficacité. Avec un petit changement toutefois : la présentation des cas annonceurs / agences sera présentée cette fois sous forme de trios : annonceur / agence / partenaire média.

Quelle est la particularité des Rencontres ? Ont-elles pour ambition de faire naître des solutions ?
Les Rencontres mettent en avant les partages d'expérience. Tous les médias sont considérés à égalité, d'un point de vue neutre, avec l'objectif de parler de contenus, de ligne éditoriale, de vision transformative… Or, quand on mixe un certain nombre d'intervenants, de témoignages clients, de témoignages de marques, cela donne l'opportunité de trouver de l'inspiration. C'est le bénéfice de toutes les conférences. Les Rencontres permettent de se rendre compte que c'est un écosystème extrêmement innovant, qui bouge très vite, traversé par de nombreuses initiatives intéressantes, rupturistes, qui peuvent donner des opportunités pour les marques. 

De quels types d'opportunités s'agit-il ?
Le digital permet d'en connaître plus sur le consommateur, c'est sa grande vertu. Il y a 10 ou 15 ans, les marques ne savaient pas grand-chose de leur consommateur, aujourd'hui, grâce au parcours des internautes, elles disposent de nombreuses informations. Les marques médias ont désormais une connaissance accrue de leurs visiteurs et peuvent monétiser ces informations, leur donner de la valeur, intéresser les annonceurs qui ont eux-mêmes besoin d'en savoir plus sur leurs cibles. 
Une autre opportunité est la capacité d'obtenir des feedbacks, de faire entrer le consommateur dans l'actualité de la marque, de créer des interactions avec lui. Nous ne sommes plus dans un système où la publicité est l'émetteur et le consommateur le récepteur. 
Enfin, la troisième opportunité vient de la diversité des contenus que l'on peut désormais émettre. Aujourd'hui, nous ne sommes plus limités par des formats imposés, la digitalisation permet une plus grande diversité de contenus : capsules vidéos valeur de la marque sur les réseaux sociaux, événements, programmes de contenus, etc. 

Le dernier Observatoire de l'epub SRI annonce une croissance digitale sans précédent sur les investissements publicitaires, est ce que ça change la donne pour la filière communication ?
Oui, de manière très forte. D'abord parce que ça oblige les experts médias à mettre constamment à jour leur expertise. Ensuite, parce qu'aujourd'hui il faut beaucoup plus d'analyse, de mesure, de temps pour monter un plan média digital. Les agences doivent faire de nombreux investissement dans les outils, dans la formation de leurs talents, pour être en mesure d'apporter une valeur ajoutée sur la partie digitale.

La reconnaissance de la valeur de notre travail est fondamentale pour la pérennité de notre métier.

L'un de nos combats se situe là : dans la reconnaissance de la valeur de notre travail. C'est fondamental par rapport à la pérennité de nos métiers. 

Dans ce contexte de new deal média, comment voyez vous l'avenir ?
Je suis assez positif : plus c'est compliqué, plus les marques vont avoir besoin de gens qui ont la culture générale de l'ensemble des moyens, plus l'expertise a de la valeur. Et ce n'est pas uniquement une question de data, il s'agit également de comprendre le désir qu'une marque peut exprimer en direction de son audience par différents canaux. Cela demande de l'investissement, du temps. Cela demande aux agences d'opérer elles aussi leur transformation. 
Plus on défendra la valeur de notre métier, plus on investira dans la qualité du conseil, des talents, et la compréhension fine de l'écosystème au service de l'efficacité des marques, plus les agences médias auront de beaux jours devant elles. Nous devons chercher à toucher les gens qui comptent au lieu de compter les gens qu'on touche, c'est la seule condition pour que l'avenir soit rose. 

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