Entretiens

« L’e-commerce a démontré son utilité sociale et son rôle d’amortisseur économique »

Au lendemain des Favor'i et de la présentation du bilan annuel de la Fédération de l'e-commerce et de la vente à distance (Fevad), son délégué général Marc Lolivier revient pour nous sur une année totalement atypique pour le secteur. 

Publié le 15/02/2021 à 12:15, mis à jour le 17/02/2021 à 16:09.

Photo de Marc Lolivier
© DR

Comment se porte l’e-commerce en ce début d’année ?

L’e-commerce a vécu une année 2020 complètement folle et exceptionnelle ! Le secteur a connu une croissance de 8,5%, avec 112 milliards de chiffre d’affaires, alors que nous étions à 11,6% de croissance l’an passé.

Cependant il y a un effet en trompe-l’œil, avec une situation très contrastée entre les produits et les services. Les produits ont progressé très fortement quand les services ont subi une baisse très sensible, notamment sur la verticale Voyages. Rappelons que sur les 112 milliards de CA, la répartition se fait à 50% sur les produits, 50% sur les services. Donc le secteur s’en sort plutôt bien, malgré des voyages en ligne quasiment à l’arrêt et la billetterie loisirs également impactée, et de l’autre côté, des ventes de produits qui ont connu une très forte progression avec +30% sur l’année. Durant les deux confinements, nous avons atteint des pics de commande et un niveau qui est resté très important entre ces deux périodes, notamment sur l’alimentaire, l’hygiène/santé/beauté, l’informatique et l’équipement de la maison.

Quelles analyses en tirez-vous ?

Tout d’abord que l’e-commerce a démontré son utilité sociale durant la crise sanitaire. Le e-commerce a permis à des millions de Français de continuer à se nourrir, s’équiper, se former, se divertir en toute sécurité et en respectant les restrictions parfois lourdes, imposées par la crise sanitaire.

La part du e-commerce dans le commerce de détail qui est passé de 10 à 14%, soit une augmentation équivalente à 4 années (...)

Côté entreprises, nous avons pu observer le rôle d’amortisseur économique des ventes en ligne pour un très grand nombre de commerces, notamment les boutiques qui ont dû fermer. Soit elles ont créé leur site d’e-commerce en urgence, soit elles ont accéléré leur transformation digitale. Cela a donc été un coup de boost formidable, avec parfois des pics à plus de 100% de croissance sur les enseignes magasins qui ont transféré leurs ventes en physique vers Internet. Ce rôle d’amortisseur économique est donc très important, même s’il n’absorbe pas toutes les pertes en magasins. Cela s’illustre notamment avec la part du e-commerce dans le commerce de détail qui est passé de 10 à 14%, soit une augmentation équivalente à 4 années puisque ce segment croît normalement d’un pourcent par an. Les stratégies omnicanales se sont accélérées et cela va laisser des traces car des habitudes de consommation se sont bien ancrées, notamment dans l’alimentaire. Si l’on trace des perspectives, l’e-commerce qui a quand même permis aux commerçants de survivre, demain cela peut représenter un élément de reprise économique intéressant, tout en offrant la possibilité de maintenir le lien entre boutiques et clients.

Quels changements, nouvelles tendances ou attentes consommateurs observez-vous ?

La crise sanitaire a conduit les Français à adapter leur mode de consommation.  Pour certains, la crise a été un déclencheur. Selon Médiamétrie le nombre de cyber-acheteurs a progressé de 1,5 million en 2020. Et pour les 40 millions de Français qui commandaient déjà sur internet avant la crise, celle-ci les a encouragé à le faire davantage. De nouvelles habitudes ont été prises depuis un an. Cela ne veut pas dire que les magasins sont appelés à disparaître. Bien au contraire, les Français sont attachés aux magasins de proximité et ils le disent. Mais ils souhaitent de plus en plus que leurs commerçants leur proposent, en plus du magasin, la possibilité de commander sur internet. C’est ce qui ressort clairement de nos études. Cette complémentarité magasin – internet est plébiscitée par les consommateurs. Si le e-commerce a permis à de nombreux commerces de traverser la crise, je suis convaincu qu’il est appelé à devenir un des principaux leviers de la reprise.

Comment voyez-vous l’année 2021 ?

C’est la première fois en 10 ans que nous ne faisons pas de projections ! En 2020, nous sommes quand même sur une croissance en baisse vs les années précédentes mais nous réalisons néanmoins une croissance de 8,5% uniquement sur les produits, donc la moitié du marché. C’est donc un secteur qui a une très forte résilience. Après, nous allons continuer à être tributaires de la crise sanitaire. Nous attendons notamment avec impatience la reprise du voyage qui représente plus de 50% de la part de marché des services. Donc si le voyage repart, et la dynamique sur la vente de produits se maintient, alors cela donne des perspectives encourageantes.

Où en sommes-nous sur les questions de RSE liées à l'e-commerce ?

En septembre dernier, nous avons sorti notre étude Enjeux avec KPMG sur la RSE. C’est une grande tendance du secteur qui est portée par 3 mouvements : celui des consommateurs qui veulent contribuer à l’effort collectif pour réduire l’impact environnemental. Rappelons qu’Internet est très bien positionné en termes d’économie circulaire. Même si, pour être, honnête, cela n’arrive pas en tête des priorités, il y a une vraie prise de conscience chez les cyber-acheteurs sur les aspects liés à l’éco-responsabilité. C’est aussi une demande au sein des entreprises, avec des jeunes collaborateurs qui poussent au changement en interne. Les entreprises aussi ont changé vis-à-vis de la RSE. Celle-ci n’est plus nécessairement perçue comme une contrainte mais bien comme une opportunité.

La RSE est véritablement une valeur montante et de plus en plus structurante pour le secteur

Aujourd’hui lorsqu’elles réduisent le vide dans les cartons, non seulement elles limitent l’impact environnemental de la livraison, mais elles gagnent aussi en compétitivité grâce à la réduction des coûts de stockage et de transport. Autre exemple : de plus en plus d’entreprises utilisent l’énergie de leurs datas center pour chauffer leurs entrepôts. Enfin, le 3e levier, ce sont les start-ups et c’est devenu un critère d’investissement de la part des fonds ou des grands groupes. Pour toutes ces raisons-là, la RSE est véritablement une valeur montante et de plus en plus structurante pour le secteur.

La FEVAD organise toute l’année des événements pour animer sa communauté. Comment vous êtes-vous organisé durant la crise ?

Comme tout le monde, il a fallu s’adapter. Nous avons lancé des webinars qui ont permis de répondre aux attentes de nos entreprises, notamment pour celles situées en province. Nous avons également considérablement développé les réunions en visioconférence. Cela nous a permis de maintenir le lien avec nos adhérents et de poursuivre les travaux au sein de nos différentes commissions métiers qui sont un peu le « poumon » de l’association. Sur nos événements d’envergure, nous mettons en œuvre des moyens vidéo plus importants comme pour les Favor’i qui ont été diffusé le 11 février sur BFM Business, l’un de nos partenaires avec qui nous avions entamé des discussions en ce sens avant la crise sanitaire. Cette diffusion de la soirée de remise des prix en direct sur une chaîne de radio et de télévision était une première.

Les Favor’i sont un événement à part qui est porté et respecté par l’ensemble de la profession.

Elle nous a obligé à repenser le déroulement de la cérémonie avec un format plus court, un contenu plus éditorialisé avec davantage de reportages produits par la chaîne. Les Favor’i sont un événement à part qui est porté et respecté par l’ensemble de la profession. C’est un événement qui rassemble les professionnels du e-commerce et qui en même temps leur ressemble. Il y a chaque année une formidable énergie qui se dégage de cet événement. C’est une belle vitrine pour le e-commerce notamment grâce au soutien de personnalités du secteur, comme Nathalie Balla, Présidente de La Redoute et qui cette année, présidait un jury composé des meilleurs experts du secteurs. Grâce à BFM Business nous avons pu accroitre sa visibilité et partager cette énergie positive avec un plus grand nombre de personnes.

Quel est votre programme événementiel sur 2021 ?

Notre année est habituellement ponctuée par deux temps forts : les Favor’i en hiver (reportés en ce début d’année en raison de la crise, ndlr) et les Enjeux en été. Deux événements qui sont structurants pour nous. Pour 2021, nous programmons les Enjeux sur septembre par manque de visibilité. Mais nos partenaires nous ont suivi et nous font confiance, démontrant ainsi leur attachement à ce bel événement.

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