Entretiens

“ Avec Consumption NXT, nous souhaitons créer le débat et pousser à une réflexion nouvelle sur la consommation ” 

Comment consommer mieux et trouver un modèle vertueux ? Eléments de réponse avec Géraldine de Sercey, Head of Strategy chez UM Paris et Pauline Baron, Brand Strategist chez FutureBrand Paris, à l'occasion de Consumption NXT. 

Publié le 22/11/2023 à 15:46, mis à jour le 23/11/2023 à 10:00.

Pauline Baron et Géraldine de Sercey
© DR

FutureBrand Paris et UM Paris se sont réunies pour produire l’étude Consumption NXT qui sera présentée le 27 novembre. Pouvez-vous tout d’abord nous rappeler le positionnement des deux agences ? 

Géraldine de Sercey : UM Paris est une agence de conseil en stratégie média dont la mission est d’accompagner les marques dans le développement de leur croissance durable. 

Pauline Baron : Chez FutureBrand, nous sommes une agence spécialisée en design et stratégie de marque.  Notre terrain de jeu étant la marque, nous aidons nos clients à transformer leurs marques durablement avec l’ambition de concilier leurs impératifs business et les impératifs sociétaux.  

Qu’est ce qui a motivé cette co-construction entre deux agences ? 

G.d.S. : Nous avons eu cette réflexion commune et cette envie de travailler ensemble car nous possédons des expertises que l’on oppose bien souvent, alors qu’elles se complètent. Ainsi, FutureBrand se positionne dans une approche long-termiste, avec une démarche qui est de fait prospective, tandis que UM Paris est très centrée sur le consommateur, avec une approche très pragmatique nourrie notamment par la Data. Nous sommes donc deux agences qui veulent aider nos clients annonceurs à se transformer avec deux points de vue qui nous semblent très complémentaires. 

Ce sera l’occasion de découvrir les résultats de votre étude portant sur la société post-consommation, étude commanditée à Kantar Media. Pensez-vous que les Français se projettent d’ores et déjà dans une ère dans la sobriété ? 

G.d.S. : C’est d’autant plus d’actualité que nous sommes à la veille du Black Friday et en pleine période d’achats pour les fêtes de fin d’année, un climax de la surconsommation ! Si l’on parle surconsommation et sobriété, il faut rappeler qu’un certain nombre de crises, qu’elles soient sociales, économiques, géopolitiques mais aussi climatiques, nous ont déjà sensibilisés au sujet et même nous ont confrontés à la pénurie de certains produits. Pour autant, est-ce que le consommateur est prêt à s’engager dans la sobriété, la réponse demeure extrêmement complexe. 

Ce qui nous intéresse, c’est de réfléchir à des solutions partagées par les marques, qui nous a donc amené à créer des scénarios que nous avons testés auprès des Français. 

Un Français sur deux a vécu la pénurie, donc a été confronté de fait à la sobriété. Grâce à notre étude menée avec Kantar Media, nous avons identifié que 58% des Français se disent prêts à changer leur manière de consommer. Ils savent que nous arrivons à la fin d’un système. Après, il y a le passage à l’acte, et là réside la difficulté. Les consommateurs comptent beaucoup sur les marques pour les aider à changer. Ce qui nous intéresse, c’est de réfléchir à des solutions partagées par les marques, qui nous a donc amené à créer des scénarios que nous avons testés auprès des Français. 

P.B. : Ces scénarios ne sont pas les seuls éléments de l’étude, nous sommes aussi revenus sur des questions plus larges liées à la consommation. Est-ce que la consommation est signe d’accomplissement par exemple, qu’est-ce que la pénurie génère-t-elle comme sentiment ?, etc. Notre sujet est réellement d’imaginer la consommation de demain en partant du réel. 

Vous avez donc établi 5 scénarios en amont de cette étude. Quelles en sont les grandes lignes ? 

P.B. : Nos cinq scénarios partaient du même constat, à savoir le manque de ressources. Ils ont des centres de gravité assez différents en termes de thématiques et interrogent chacun à leur manière de nouveaux schémas de consommation. L’un prend le prisme d’une consommation ultra-mesurée, un second celui d’une consommation naturelle basée sur les cycles de la nature, le troisième se base sur la notion de mérite de consommer ou bien de produire, un quatrième porte sur une consommation qualitative et enfin un dernier sur la consommation ultra-essentialisée, avec moins de choix.

Si l’on prend le schéma de la consommation ultra-mesurée, nous sommes partis de l’idée de produits qui s’ajustent à chacun, selon ses besoins. Ce qui n’est pas sans poser un certain nombre de questions, notamment en termes de gestion des données personnelles et de liberté individuelle. Dans le scénario d’une consommation ultra-naturelle, nous questionnons comment, non plus dominer la nature, mais s'harmoniser avec elle et produire avec les temporalités qui lui sont propres.

Pouvez-vous revenir sur le scénario qui replace le mérite au cœur de la consommation ? 

P.B. : Concernant la question du mérite, nous sommes partis de l’idée qu’aujourd’hui, consommer est tellement facilité, sans friction, qu’on consomme trop sans s’en rendre compte et cela peut engendrer une mauvaise estime de soi, faire culpabiliser. Aussi posons-nous la question de comment créer de la satisfaction, par un effort personnel et collectif, mais aussi au travers de marques dites méritantes. Considérons aussi que demain notre temps pourrait devenir une monnaie d’échange. Toutes ces notions d’attente, d’effort, d’une nouvelle forme de performance des marques sont très intéressantes. 

Si l’on caricature un peu, je dirais que c’est la fin du consommateur-roi. Celui-ci a des devoirs vis-à-vis des marques, tout comme ces dernières en ont vis-à-vis de lui.

G.d.S. : Si l’on caricature un peu, je dirais que c’est la fin du consommateur-roi. Celui-ci a des devoirs vis-à-vis des marques, tout comme ces dernières en ont vis-à-vis de lui. Il faut rééquilibrer la relation entre la marque et le consommateur pour justement être dans l’engagement. Un engagement duquel débouchent satisfaction et estime de soi. 

Y a -t-il un scénario qui ressort plus particulièrement de cette étude ? 

G.d.S. : Les Français n’ont rejeté aucun scénario, c’est assez équilibré. Le grand enseignement à retenir demeure que le choix des possibles est énorme, d’autant qu’évidemment ces différents scénarios sont poreux et s’imbriquent. On pourrait même imaginer demain d’autres scénarios. 

Comment les marques font-elles pour se projeter face à des consommateurs à la fois volatils et aux comportements contradictoires ? 

G.d.S. : Nous avons bien conscience de la difficulté pour les marques de se repérer et se projeter. Si l’on veut que le consommateur accepte le changement et qu’il passe à l’acte, il faut que les marques fassent de la pédagogie, soient dans la stratégie de la preuve et enfin dans l’accompagnement. Grâce à ces trois leviers, il est possible d’accompagner efficacement le changement de consommation. 

L’expérience proposée va acquérir également de plus en plus d’importance. Une bonne manière de récompenser l’engagement des consommateurs et de nourrir la fidélité à la marque. 

En cette veille de Black Friday, le prix ne reste -t-il pas le 1er critère de l’acte d’achat ? 

G.d.S. : C’est certain que la question reste complexe, qui plus est en période d’inflation et de pénurie. Mais ce qui est sûr c’est qu’il nous faut changer de KPIs d’efficacité. C’est un gros challenge pour les marques et des agences comme les nôtres qui doivent trouver des KPIs qui ne soient pas que ceux de la rentabilité.

Si l’on reste sur des KPIs de rentabilité, alors la question des prix demeurera centrale. 

Aujourd’hui il y a des marques qui communiquent sur le fait de remplacer que ce l’on détruit, alors que l’on sait que la question est avant tout d'arrêter de détruire. Si l’on reste sur des KPIs de rentabilité, alors la question des prix demeurera centrale. 

Comment des agences comme les vôtres accompagnent-elles leurs clients sur le chemin incertain, mais impératif, d’une consommation raisonnée ? 

G.d.S. : En tant qu’agence média, nous sommes un partenaire business tout au long de la chaîne de communication. La question de la RSE est très prégnante chez nos clients, mais nous souhaitons véritablement faire passer le message qu’il n’y a pas que le prix qui est important et qu’il faut réfléchir à d’autres valeurs. Les marques ont une jambe dans “ comment préparer demain” et l’autre jambe dans “ je dois écouler mes stocks ” donc il faut forcément trouver un point d’équilibre. 

P.B. : Nous sommes dans une période de transition où le changement ne s’opère pas en un jour, même si certains y arrivent. Derrière notre consommation reposent de nombreux enjeux et c’est pourquoi nous voyons nos scénarios comme des tremplins pour se projeter et envisager de nouvelles solutions. Tout restera une affaire de compromis mais déjà, rééquilibrons la relation marque / consommateur, dans un objectif commun. FutureBrand étant très en amont dans la chaîne de valeur communicationnelle, nous travaillons avec nos clients, sur des changements de fond que les consommateurs vont pouvoir appréhender. A nous de changer les codes et d’en créer de nouveaux pour changer nos habitudes. 

Quel est le profil de l’audience que vous attendez le 27 novembre et qu’attendez-vous de cet événement ? 

G.d.S. : Consumption NXT est un rendez-vous marché, aussi nous avons invité les grandes marques et les médias. Avec cet événement nous souhaitons créer le débat et pousser à une réflexion nouvelle sur la consommation. Les consommateurs sont prêts à changer, aussi il faut aller plus loin ! 

P.B. : Notre partenariat repose sur une posture collective, ce qui ne veut pas dire que nous sommes d’accord sur tout et que nous avons les mêmes manières de faire. Mais la démarche est là, et c’est très enrichissant pour nos deux agences ! 

Les événements rattachés

lun. 27 nov 2023
Paris

Auditorium Les Echos Le Parisien

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Consumption NXT

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Consumption NXT

08:30

Pour une société post-consommation. Quand l’impératif du manque de ressources ouvre de nouveaux...

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